Le petit chez-soi de Daniel

Les oiseaux chantaient. Sans doute une belle journée qui s'annonçait.
Daniel se réveilla lentement, avec l'envie de retourner se coucher. Mais ça n'était pas le moment de penser à dormir, il avait toute une liste de choses à faire pour aujourd'hui.

Que des choses ordinaires hélas. Rien de palpitant une fois de plus:
- Préparer à manger en évitant de se brûler avec la casserole
- Ranger sa chambre...enfin mettre ses affaires n'importe où sauf par terre
- Acheter de nouvelles graines pour son mini jardin

Après s'être préparé, le jeune homme ouvrit la fenêtre qui donnait sur un petit balcon. De l'air frais mais saturé question pollution.
Il arrosa les quelques plantes qui s'y trouvaient puis referma la fenêtre.
Qu'allait-il acheter cette fois-ci? Des tomates ou bien des fraises?

D'un geste mécanique, il s'empara de ses lunettes de soleil, d'un blouson en jean et de son écharpe fétiche.
Soupirant, il descendit la trentaine de marches et ferma la porte derrière lui.

(HRP: Désolé, ce post à mit beaucoup de temps à sortir, j'ai eu un mal de chien à trouver l'inspiration pour démarrer; ça devrait aller un peu plus vite maintenant)


« Attends, 'faut pas déconner non plus! Figures toi que la police à mené sa petite enquête, et sache que la dame n'en était pas à sa première arnaque! Tu veux savoir le nombre de boîtes qu'elle a fait couler comme ça? »

« Oui, enfin je connais pas ses précédentes victimes, mais je vais pas plaindre sa dernière. Tu n'as jamais entendu parler de Hecat? Crois-moi, le patron de cette société à dû mettre plus d'employés dans la merde que cette femme n'a pu envoyer au tapis d'hommes honnêtes. Moi ce qui me chiffonne le plus, c'est pas que cette arnaqueuse se fasse chopper et soit punie pour tout ce qu'elle a fait, mais c'est qu'un chef d'entreprise bluffeur et hypocrite puisse profiter du système pour s'en mettre plein les poches, envoyer tous les employés honnêtes dans le décors, le tout sans que personne ne vienne jamais lui dire quoi que ce soit. »

La conversation s'interrompit alors qu’un fracas assourdissant se répercutait d’abord dans la rue, puis à l’intérieur du bar où se tenait la conversation. Tout le monde sursauta sur le moment, rien dans ce magnifique début de journée n’ayant pu permettre de deviner qu’un évènement aussi marquant pourrait avoir lieu. Ricco imita tous les autres buveurs du moment et se tourna vers les vitres donnant sur la rue. Rien à portée de vue, l’accident devait avoir eu lieu plus loin ; il porta son verre à ses lèvres et avala le reste du contenu d’une traite, se leva et déposa un billet sur le comptoir.

« Voila pour ma note, garde la monnaie ! »

Il se dirigea vers la porte, curieux de voir ce qui venait de se passer au même titre que les autres badauds. Dehors, l’air était doux ; pas un nuage à l’horizon, le soleil ne se faisait donc pas briller pour taper aussi fort qu’il le pouvait ; le genre de journée où les gens préféraient généralement sortir profiter de ce ciel radieux, se balader, faire du shopping, bronzer, ou faire n’importe quelle activité en extérieur... bon, peut être pas tant que ça au final vu la température. Pour le jeune homme, la question ne se posait pas de toute façon puisqu’il devait aujourd’hui également travailler, son dernier salaire n’ayant pas été aussi confortable qu’il l’aurait souhaité.

Mais alors qu’il prenait un verre en discutant des dernières nouvelles en ville avec le barman, le drame était arrivé. Tous les mouvements dans la rue semblaient converger un peu plus loin au niveau du croisement, celui qui était juste avant l’arrêt de bus. Devant la foule compacte, Ricco ne parvint pas vraiment à s’avancer pour voir ce dont il était question, et vu qu’il n’avait pas envie de jouer des coudes pour cela, il dû trouver une alternative qui lui vint à l’esprit lorsque son regard se posa sur sa voiture qui était garée devant la maison d’un ami, juste devant cet amas de personnes. Il enjamba la barrière qui le séparait de son véhicule et monta sur le capot de celui-ci. Avec son altitude fraichement acquise, il eu bien plus de détail sur ce qui se passait.

Un bus, une voiture… Ou plutôt une voiture dans un bus ; pas un spectacle très rassurant à voir. Vu comment était fichu cet assemblage insolite, le conducteur du véhicule le plus léger avait dû chercher à griller la priorité au transport en commun, pensant que ce dernier ralentirait. Manque de chance, soit celui-ci ne l’avait pas remarqué ou n’avait pas fait attention, soit il n’avait pas voulu se laisser faire. Il dû se rendre à l’évidence, le comportement de certains gens sur les routes était plutôt navrant ! D’autant plus lorsqu’on montrait toute l’étendue de sa bêtise au volant en plein dans un quartier résidentiel, avec tous les habitants s’occupant de leur balcon ou sortant de leur immeuble pour aller vaquer à leurs activités en tant que spectateurs. On pouvait même voir au premier rang de l’assemblée des gamins qui ne devaient pas avoir plus d’une dizaine d’année, pour être à ce rang, ils devaient avoir été aux premières loges lors de la catastrophe !

Est-ce que quelqu’un avait eu le réflexe ? Sans doute, mais il fallait quand même que lui aussi l’ai, juste histoire de ne rien laisser au hasard. Ricco sorti son téléphone pour y rentrer un simple numéro, le 18. Ensuite ? Et bien il n’avait rien d’autre à faire, il y avait déjà suffisamment de gens présents pour couper l’air aux accidentés, il n’allait pas aggraver la chose ; il coupa son mode spectateur, descendit de son perchoir pour retourner dans le bar où il avait coupé prématurément sa conversation.

=====Une demie-heure plus tard=====

Les clés tournèrent dans le contact, faisant vrombir le moteur de l’engin qui s’éleva dans le tintamarre de la ville ; une cacophonie à laquelle il ne prêtait déjà plus attention depuis bien longtemps au même titre que presque tous les habitants. Certaines personnes disent que pour garder ses nerfs en bon état dans les agglomérations, il est important de faire des pauses et de passer du temps dans les parcs ou à l’extérieur, en campagne, mais aux yeux de Ricco, les gens qui avaient besoin de cela n’avaient juste pas choisi le bon endroit pour s’installer. Il connaissait un nombre impressionnant de gens qui n’avaient pas ce genre de pratique et qui étaient en parfaite santé mentale. Il alluma la radio avant de poser les mains sur le volant et de fermer les yeux ; si ses souvenirs étaient bons, il allait devoir rejoindre la rocade nord pour ensuite filer en direction d’un de ces patelins minuscules dont le nom est facilement oubliable car éclipsé par la proximité d’une ville telle que Sérès.

Il jeta un bref coup d’œil vers l’endroit de l’accident ; il y avait toujours du monde malgré l’extraction fructueuse des malheureuses victimes. Par chance le bus n’étaient pas très peuplé et il n’y avait pas eu de victime à l’intérieur, bien que deux personnes aient obtenues un allez simple pour l’hôpital et une chambre pour une durée indéterminée. La personne qui conduisait la voiture s’en était tirée également sur un brancard, mais il n’aurait sans doute pas le temps de souffler lorsqu’il pourrait se relever au vu des poursuites judiciaires auxquelles il ne couperait très certainement pas. Le trafic avait été naturellement fortement perturbé et la seule ligne de bus qui passait par là allait suspendre ses activités dans le coin pour une partie de la journée sans doute.

Il démarra et tourna pour partir dans la direction opposée à l’accident, n’ayant pas vraiment envie de se retrouver bloqué à peine parti ; il allait faire un petit détour, mais il gagnerait du temps.
Sur la droite, un arrêt de bus, celui auquel était supposé s’arrêter le véhicule qui était désormais bon pour aller au garage si ce n’était à la casse. Et qu’y avait-il, attendant patiemment à cet arrêt ? Un jeune homme qui patientait, l’écharpe au cou, manifestement sans savoir qu’il n’était pas la peine d’attendre pour l’instant, il aurait plus vite fait de rejoindre à pied un endroit qui serait desservi par les transports en commun. Il fallait dire que cela ne faisait qu’une demi-heure que l’accident avait eu lieu et que l’information n’avait pas bien circulée. Ricco mit son clignotant et s’arrêta sur l’emplacement normalement réservé au bus ; il ne risquait pas de gêner grand monde de toute façon. Il abaissa la fenêtre du côté passager et se pencha en direction du jeune homme.

« C’est pas la peine d’attendre, il y a eu un accident qui bloque le trafic, le bus passera pas. »

Daniel eu un léger sursaut lorsqu'une voix se fit entendre assez proche de lui.
- C'était donc ça tout ce raffut? fit-il calmement.
Le jeune homme avança en direction de son interlocuteur et s'arrêta net.
- Merci de m'avoir prévenu. Savez-vous s'il y a un autre arrêt de bus pas loin?
Il remonta son écharpe comme s'il avait froid et ajusta ses lunettes qui commençaient à les gêner.

Un peu d'action? Il l'espérait. Cela faisait bien longtemps qu'il n'avait pas parlé à quelqu'un d'inconnu et, en dehors du monde du rêve, il s'ennuyait fermement.
Il profita de ce moment pour engager la conversation:
- Que s'est-il passé au juste?
Il s'interrompit; voilà comment mal commencer une conversation: ne pas se présenter...
- Ah! Au fait, je m'appelle Daniel Acanthe et vous?

Il avait l’air d’avoir la tête un peu dans la lune, le genre de personne que Ricco n’avait pas vu depuis bien longtemps. Les milieux qu’il fréquentait n’étaient pas ceux qui attiraient les rêveurs, ou alors ceux-ci restaient plutôt discrets. De toute façon, le genre de mec que cette personne pouvait être ne l’intéressait pas vraiment ; non pas que le jeune conducteur se désintéressait des autres, mais il n’était tout bonnement pas viable de chercher à tout savoir au sujet de tout le monde et de se lier avec quiconque croisait son chemin ; et puis, comme tellement d’autres gens, ce garçon ne devait donner aux avis d’inconnus qu’une importance très relative.

Ricco repassait sa première vitesse et s’apprêtait déjà à lâcher l’embrayage lorsque ce garçon décida de le maintenir en embrayant sur une brève question concernant le prochain arrêt. Il ne devait pas être en ville depuis bien longtemps. Pour toute personne usant des transports en commun, se tenir informé du réseau en général était primordial, ou bien on courrait au devant de gros ennuis si jamais une urgence survenait.

«L’arrêt le plus proche doit être St Comeuré, y’en a pour une dizaine de minutes à pied je dirais.»

Il n’avait même pas remit le point mort tant il pensait que son interlocuteur allait se contenter de le remercier avant de se mettre en route pour ne pas louper le prochain bus mais non ; ce garçon avait envie de contredire les habitudes, chose originale. Il n’avait pourtant pas l’air d’être du genre très bavard lorsqu’il l’avait abordé ; peut être un de ceux qui n’osent jamais prendre la parole, mais qui décident de mettre le paquet dès lors qu’ils commencent à s’exprimer ?

«Une voiture qui a voulu griller une priorité à droite un peu plus loin dans la rue et qui est parti s’encastrer dans le bus il y a une trentaine de minutes. »

- Ah! Au fait, je m'appelle Daniel Acanthe et vous?

Daniel le tueur de conventions ? Cela lui allait à merveille ! Soit il faisait franchement dans l’excès de politesse, soit il devait appartenir au clan des « forever alone » qui ne loupait jamais une opportunité d’essayer de se faire des amis. Donner son nom après sept phrases de conversations à un type qu’il n’avait jamais vu et qui s’était juste brièvement arrêté sur un arrêt de bus (et donc dans un état de fraude tout à fait assumé) pour prévenir qu’il y aurait énormément d’attente avant que le prochain ne passe… Il n’avait pas l’air de vouloir arrêter la conversation aussi rapidement.

«Ricco. Si ça te chante et que tu vas pas trop loin, je peux te déposer, j’ai du temps devant moi. »

Ce Daniel avait fait tant d’effort pour allumer le début du brasier de la discussion, il aurait été dommage de réduire tous ses efforts à néant ; de plus, Ricco était de franchement bonne humeur ce matin et était apte à faire son quota de bonnes actions pour la journée ; et puisqu’il n’était pas à un endroit idéal pour faire durer une conversation…

Daniel ne su pas quoi répondre. Il n'avait plus l'habitude de côtoyer les gens.
Il s'était installé en ville deux semaines auparavant et ne connaissait pas encore tous les quartiers.
Si ça ne tenait qu'à lui, il aurait poliment refusé son offre mais il n'avait pas vraiment le choix.
- Je veux bien, merci... fit-il d'un ton un peu hésitant.

Une fois qu'il serait près de l'arrêt de bus, il pourrait se débrouiller de nouveau et ça, c'est ce qu'il voulait.
Il ne se rendait pas au centre commercial uniquement pour les plantes, c'était aussi un moyen de s'évader, même s'il ne pouvait admirer son architecture.
Et, qui sait? Y aurait-il un peu d'action? Histoire de casser un peu cette monotonie écrasante.
Au moins il aura rencontré quelqu'un dans la journée; ça ne lui était pas arrivé depuis bien longtemps.
Le regard des gens sur lui le dérangeait à tel point qu'il ne sortait que très rarement de chez lui.
Au moi, dans l'autre monde, l'apparence ne comptait pas.
Il lui tardait d'y retourner...

Ricco lui ouvrit la porte pour que le jeune homme puisse se mettre à la place du mort. Pendant que Daniel s’installait, il alluma la radio et baissa un peu le volume. Il aimait bien avoir un bruit de fond quand il conduisait, au même titre que des milliers d’autres conducteurs, mais celui-ci ne devait en aucun cas gêner les éventuelles conversations. Un appareil ne saurait jamais remplacer les relations humaines, et si les présentateurs et interviewés que l’on pouvait entendre étaient très intéressants, il n’était pas possible de leur répondre, contrairement aux passagers, aussi mal à l’aise pouvaient-ils avoir l’air.

«Et bien monsieur Daniel, bienvenue à bord, nous espérons que vous passerez un agréable voyage, si vous avez la moindre question ou le moindre problème, sachez que l’équipage se tient à votre entière disposition. » fit-il en prenant un ton qui se voulait le plus formel possible, tentant d’imiter les stewards à bord des avions, le tout en gardant un sourire chaleureux.

Après s’être assuré que son passager avait bien attaché sa ceinture, il repassa la première vitesse pour vite dégager de cet arrêt de bus. Personne ne risquait d’être gêné dans l’immédiat, mais la loi était la loi, et si un policier ou un gendarme passait par là alors qu’il était arrêté sur l’arrêt, il aurait droit à l’amende sans le moindre doute ! Alors que le moteur se remettait à émettre son bruit de croisière, le conducteur reprit.

«Et donc où est-ce que je te dépose Daniel ? »

Il allait bien lui falloir une destination si il ne voulait pas aller larguer cette pauvre personne dans un patelin au nom obscur adjacent à l'agglomération principale et par conséquent bien éloigné du centre ville... à moins qu'ils n'allaient tous deux à la même destination, mais cela était fort peu probable à vrai dire. Ce Daniel devait plutôt se diriger vers le centre ville, comme tous les jeunes de son âge à une telle période de l'année.